Ep 13 - La Victimisation
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Il est à présent temps que l'on parle de la victimisation plus en détail.
C'est l'une des techniques les plus utilisée dans la manipulation, presque à niveau égal avec la culpabilisation !
Il faut dire que les 2 sont très liées.
Un peu comme toutes les techniques que j'ai rangé dans la catégorie de la toxicité vous me direz, et vous pourriez rajouter « aussi comme toutes les techniques depuis le début, en fait ! »
Et je répondrais... ben oui.
Mais ces 2 là plus particulièrement !
Pour shematiser, c'est l'étape ou la personne qui manipule se plaint que sa victime est en fait son bourreau, et trouve une justification toute claquée pour se venger.
C'est une technique qui va puiser dans la plupart des précédentes techniques qu'on a déjà vu, et qui a pour seul but de renverser toutes les valeurs de jugements afin de faire passer le bourreau pour la victime, et vice versa.
Et vous pouvez reprendre la liste des techniques utilisées depuis l'épisode 3 !
Mais il y a une petite technique dans la technique dont il faut que je vous parle, c'est la reformulation.
Reformuler pour le manipulateur, c'est vraiment le couteau suisse de la victimisation.
On peut tout raconter, tout faire passer quand on reformule en se faisant passer pour la victime !
Ça arrive très souvent dans les discussions, que quelqu'un utilise cette phrase : Mais tu veux dire que... ou quelque chose d'approchant
En générale, ce qui vient derrière est souvent exagéré, complètement orienté pour victimiser celui qui parle, et qui va tout faire pour éviter de comprendre ce que vous avez essayé d'exprimer.
- T'aime pas ma robe ! Tu veux dire que je suis moche, c'est ça ?
- Comment ça, je me trompe ? Donc si j'ai bien compris, je suis trop con?
Ou trop nul, ou tout autre chose pour vous faire dire ce que lui à besoin de vous faire dire pour se plaindre.
Pour moi, quand quelqu'un utilise ce genre de phrase, c'est comme s'il prenait lui-même mes 2 mains, qu'il se les collait autour de la gorge en disant que c'est moi qui l'étouffe.
C'est un mensonge fabriqué sur la base de votre vérité.
En argumentation on appelle ça un « homme de paille ».
Pour ça, il faut prendre un exemple caricatural, le présenter de façon à ce que les gens le croient, et dire que l'on n'est pas d'accord avec ça !
Comme ça, on s'achète à très peu de frais une légitimité et l'approbation des gens.
C'est
un peu une évolution de la décrédibilisation, mais en plus
agressif.
Mais en plus de la décrédibilisation, il y a aussi cet égocentrisme outrancier et forcé. Les gens qui font ça sont très centrés sur leur personne, comme si tout ce que vous pouviez dire était une attaque personnelle.
Mais nous avons encore plus vicieux dans cette catégorie :
Nous avions déjà parlé du Bourreau, et particulièrement dans la culpabilisation.
Aujourd'hui, nous y ajoutons la victime.
Mais il manque un rôle, tout à fait indispensable et dont nous n'avons pas encore parler pour boucler ce triangle dramatique.
Je n'en ai pas parlé jusqu'ici car il était implicite, c'est le sauveur.
Si vous subissez un bourreau, dites-vous bien que si vous avez pu tenir dans cette situation jusqu'a présent, c'est bien que le sauveur était en vous... Et je ne parle pas de religion!!!
Le Sauveur en vous, en nous tous en fait, c'est cette pulsion qui nous maintient dans l'idée que nous pouvons aider.
Nous pouvons sauver la personne, peut-être d'elle-même, quitte à continuer à endurer ses manipulations, ses reproches, ses brimades, pour certains ou certaines, peut-être ses coups ! Et oui, ça arrive.
Nous avons tous rencontré depuis l'enfance ce triptyque. C'est un des jeux de société les plus répandu au monde, et je parle vraiment au sens littérale du terme !
Ce n'est pas un jeu qui se joue tout seul. Il faut au moins être 2, et c'est encore plus grandiose et dramatique quand il y a du publique, vous le savez !
C'est pour ça qu'il porte bien son nom, le triangle dramatique !
La seule règle à suivre est simplement de réagir à ce qu'on vous dit ou ce qu'on vous fait subir.
Tout est calibré pour que le jeu se passe sans même que vous ayez conscience des règles.
Le problème pour vous, en étant un petit pion à l'intérieur de ce jeu, c'est de ne jamais vraiment savoir que c'est un jeu, et vous ne pouvez pas, du coup, prendre suffisamment de recul et de hauteur pour comprendre la stratégie des autres, et réussir à déterminer qui joue avec vous et qui peut jouer contre vous !
Il y a donc 3 rôles à attribuer, la victime, le bourreau et le sauveur.
Mais le plus important à comprendre, c'est que ces rôles ne sont pas définitifs, ils sont interchangeables !
On va commencer par une situation toute simple à 2 personnes :
Le bourreau lance un reproche, c'est ce qu'il sait faire de mieux !
La personne qui le reçois devient donc Victime. Chacun à donc un rôle pour commencer, mais il manque le rôle du sauveur.
Le bourreau va donc dire à sa victime que ce qu'il lui balance à la tête, ben c'est pour l'aider, pour qu'elle aille mieux ! Pour qu'elle s'en sorte.
A ce moment là, il prend le rôle de « sauveur ». Il peut continuer ses reproches en disant a sa victime qu'elle ne l'écoute pas, qu'elle ne voit pas que ça le blesse, lui, de ne pas pouvoir la sauver. Qu'il fait ça pour elle ! Etc...
Il se fait passer pour une victime dévouée, et ce faisant, fait passer sa victime pour son bourreau.
Il a, maintenant, tout loisirs de se faire plaindre.
On a déjà vu qu'un bon manipulateur trouve toujours des problèmes et jamais de solutions pour l'amélioration de sa propre vie, Il rend le monde extérieur responsable de ça.
Donc si la victime, devenue le bourreau de l'histoire, tente de redevenir sauveur en lui proposant de l'aider, le manipulateur ne va pas accepter.
Il va encore retourner la situation en disant, par exemple, qu'il se venge, qu'il ne lui fait plus confiance, qu'elle l'a déjà trahit, que tout ce qu'il lui reproche c'est complètement mérité, etc...
Et on revient à cette position de départ, Le bourreau est redevenu bourreau et la victime est finalement restée la victime.
Absolument rien n'a avancé, mais tout est déjà en place pour refaire un tour gratuit, et puis un autre, et puis encore un autre, jusqu'à épuisement physique, parce que l'épuisement des arguments, le manipulateur, il ne connaît pas, ça !
Et si une 3ème personne s'interpose pour calmer le jeu, elle prend d'office le rôle de sauveur, mais ça ne changera absolument rien.
Elle va tenter de faire l'arbitre en donnant raison à l'un ou à l'autre pour équilibrer les torts.
Mais même avec beaucoup de tact, ça n'empêchera pas l'un des 2 de se sentir blessé, de se victimiser, et c'est reparti.
Et on peut rajouter encore, comme ça, plus de personnes, ça ne changera jamais rien.
Chaque personne va se retrouver le bouc émissaire d'un triangle sans cesse en mouvement selon tout les joueurs impliqués dans la partie.
On va se retrouver avec des bourreaux de bourreau, des victimes de victimes, et tout ceci dans une mécanique instinctive digne d'un horloger.
C'est encore un signe du coeur puéril qui anime la mécanique de la manipulation.
Votre consentement est biaisé par votre volonté de sauver. Soit sauver la personne d'elle-même, soit sauver la situation, ou soit vous sauver vous.
En fait, c'est votre volonté de vous justifier qui biaise votre consentement et qui vous fait entrer, de votre plein gré dans cette partie sadique, dans cette valse délétère.
Tout ces retournements et changements de rôles sont connus, quelques uns ont des noms, d'ailleurs, pour les identifier.
Le plus connu est le « Qui perd, gagne », ou la personne cherche systématiquement à retrouver sa position de victime pour pouvoir dire qu'elle est trop nul, quelle ne pourra jamais changer, etc.
Souvent, d'ailleurs, la personne se dévalorise toute seule avant d'essayer de changer, elle essaye puis elle rate, et elle se plaint d'elle-même.
En revenant sur cette position défaitiste, elle ne fait que valider ce qu'elle avait annoncé. C'est une sorte de prophétie auto réalisatrice.
Mais surtout, en faisant ça, elle gagne ! Comme elle avait dit qu'elle raterai, ben le fait de rater lui donne raison. D'une certaine manière, elle à atteint ce qu'elle cherchait à obtenir.
Et des situations comme ça, il y en a pleins dans le triangle dramatique.
Ce sont ce qu'on appelle des « Jeux psychologiques », ces même jeux psychologiques dont je parle dans chaque début d'épisode, et des sociologues leur ont donc donné des noms, comme le « jambe de bois », le Gaffeur », « le miens est mieux que le tient » ou « j'essaie seulement de vous aider ».
En fait, on les connais, ces jeux psychologiques, mais on n'imagine pas qu'ils puissent être décortiqués et identifiés comme ça.
Je vous invite à vous renseigner dessus si ça vous intéresse.
La victimisation, c'est l'exagération d'une souffrance quelle qu'elle soit pour « justifier » un statut de victime.
La peur à l'origine de la justification est donc la peur de ne pas pouvoir suffisamment justifier ce statut de victime.
C'est donc que la victime est déjà soumise à la mécanique de justification, mais aussi, qu'il y a une idée constante dans le tête de la victime qu'il lui faut un regard extérieur pour faire reconnaître tout ce qu'elle va justifier.
La victimisation est donc fondamentalement ancrée sur un triptyque.
Elle a besoin de subir et de montrer qu'elle subit, comme dans une sorte de mise en scène de sa douleur.
Mais il y a aussi une peur de ne pas être à la hauteur, pour certaines personnes.
Une véritable peur plus viscérale de ne pas être au niveau de ce qu'elle voudrait obtenir, de ne pas mériter les encouragements ou le pardon, et qui n'est pas du tout cette monstration de souffrance comme je l'ai dit plus tôt.
Elles peuvent se conditionner à ne voir que les choses qui ne vont pas.
Ces personnes sont souvent des victimes toutes désignées pour les manipulateurs, d'ailleurs.
Les
manipulateurs, eux, ont cette influence sur leur victimes qui peut amener
ces dernières à devenir aussi bourreau.
L'illusion de contrôle que peuvent apporter certaines techniques de manipulation peut très bien satisfaire certaines personnes qui comprennent que leur peur viscérale peut être utilisée comme une force.
Et après avoir appris à mettre en scène leur statut de victime, elles finissent par devenir bourreau et se font parfois passer pour sauveur uniquement pour conjurer leur peur de ne pas être à la hauteur simplement en exagérant.
Il existe une technique pour contrer la victimisation, c'est d'aider la personne a reconnaître sa vulnérabilité et lui faire comprendre le parcours qu'elle a à faire, étape par étape, pour retrouver confiance en elle.
Il faut envisager avec la personne un parcours de petites victoires pour que son cerveau réapprenne à lui envoyer un shoot de récompense.
Pour qu'elle perde l'habitude de se shotter avec sa manie d'anticiper ses echecs.
Il faut aussi lui apprendre a exiger moins d'elle-même.
Souvent, l'avis défavorable qu'elle à d'elle-même vient de l'extérieur.
Ça peut venir d'un parent ou d'une autre personne de la famille, donc parfois depuis l'enfance, pas forcément.
Ça peut aussi être la société qui renvoi une image idéalisée dans les médias, et certaines personnes peuvent s'efforcer à vouloir coller à ces images, et ça peut les démoraliser.
La personne doit s'occuper de reconquérir son estime d'elle-même pour sortir doucement de la victimisation.
N'oubliez jamais qu'il ne faut pas la forcer. C'est à elle de demander de l'aide. Elle doit donc faire ces efforts toute seule.
Vous pouvez l'aider, bien sûr, mais c'est excessivement chronophage et énergivore.
Et plus cette morosité est ancrée, et plus ça va prendre du temps et de l'énergie pour l'entourage.
C'est un investissement du temps de cerveau qui est plus pratique pour quelqu'un de très proche, comme un conjoint, ou un parent.
Le
triangle dramatique peut se retrouver dans des situations très
anodines, et utilisé par des personnes qui ne sont pas forcément
des manipulateurs chevronnés, mais qui se sentent blessés et qui
vont, sans le vouloir, alimenter une ronde infernale qu'ils ne
maitrisent pas.
Pour résoudre le triangle dramatique, qu'on appelle aussi le triangle de Karpmann, il existe un autre triangle appelé le triangle des gagnants.
Malgré qu'il y ait des changements de rôles dans le triangle dramatique, chaque personne à un rôle préféré, celui avec lequel elle est le plus a l'aise.
Ça se sent, ça se voit. À force de faire des reproches tout le temps, certains sont plutôt bourreau, ou persécuteurs, comme on dit. D'autres ont fondamentalement des âmes de sauveurs, et d'autres de victimes.
Et bien pour chaque rôle de prédilection, il faut faire un travail sur les avantages de chaque rôle.
Le sauveur, c'est sa bienveillance. Il faut donc l'amener à ne pas perdre de vu cette qualité qui est en lui.
Il peut la perdre en voulant trop souvent avoir raison.
La victime, c'est sa vulnérabilité qu'elle doit accepter et cette authenticité au fond d'elle-même qu'elle doit écouter et laisser s'exprimer.
Plus elle va écouter ses propres besoins, et moins elle va accepter les besoins des autres.
Et pour le persécuteur, il faut l'inviter à exprimer plus clairement ce qu'il veut, sans détours, sans manipulation et sans « non-dits », pour qu'il sache affirmer ce qu'il souhaite obtenir ou atteindre et qu'il soit entendu, voila.
C'est pas dit qu'il faille forcément aller dans son sens, mais au moins il sera entendu.
Et pour rappel, la CNV peut aussi très bien marcher dans cette situation, d'ailleurs le triangle des gagnants en reprend quelques idées.
Et sinon, ben pour les manipulateurs chevronnés, ya pas 36 solutions.
Si on voit que la bienveillance et l'acceptation de la vulnérabilité ne brise pas sa determination, et ben on arrête tout !
On quitte la discussion et on ne porte plus attention à cette personne.
Ces jeux se jouent à 2 minimum. Donc cassez la partie et cessez de lui donner de l'attention.
Les jeux psychologiques n'ont de jeux que le nom !
A quoi bon vouloir continuer à jouer à ce jeu ou personne ne gagne vraiment.
N'oubliez pas que la manipulation toxique pourrie tout ce qu'elle touche!
Elle est contagieuse à sa façon !
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